Le vent souffle sur les terres calcinées du royaume de Krenian, emportant les cendres d’un âge oublié, mais non pardonné. Les murs sont en ruine, les villages réduits à des squelettes de bois, et le silence des plaines n’est troublé que par l’écho lointain des guerres passées. Dans Akatsuki: Lord of the Dawn, développé par Zoo Corporation et sorti sur Xbox Series le 26 mars 2025, vous incarnez un noble par défaut, un pion promu général, jeté dans les vestiges d’une terre qu’il faut reconquérir et comprendre.
Mélange de RPG tactique en temps réel et de gestion de territoire, Akatsuki ne cherche pas la gloire immédiate. Il vous confie une carte, quelques unités, et un royaume ravagé que vous devrez reconstruire, brique par brique, vie par vie. Il n’est ni grandiloquent, ni spectaculaire. Il est méthodique, rugueux, presque austère; comme le sont souvent les lendemains de guerre.
Mais derrière ses tableaux de statistiques, ses formations militaires et ses récoltes de ressources, Akatsuki a-t-il le souffle épique d’un véritable seigneur stratégique, ou n’est-il qu’un fragment de lumière coincé dans les limbes d’un tactical trop frugal ?
Le royaume en lambeaux, les volontés en déroute
Il n’y a pas de destin glorieux dans Akatsuki: Lord of the Dawn, seulement des responsabilités tardives, des héritages meurtris, et des promesses que personne n’a vraiment faites. Le royaume de Krenian, autrefois ravagé par le roi démon, ne célèbre pas les héros — il les enterre dans des fosses communes, puis nomme un nouveau seigneur comme on place un bouchon sur une fissure.
Vous incarnez Ark Badona, jeune noble propulsé à la tête d’un domaine brisé. Il n’est ni prince déchu, ni élu sacré, mais un administrateur de ruines, un chef désigné parce qu’il restait debout quand les autres tombaient. Le jeu ne développe pas sa psychologie à travers des choix narratifs ni des dialogues complexes — il en fait un repère stratégique, un nom sur une carte. Ark ne parle pas vraiment. Il agit. Et c’est tout.
Les autres personnages — une quarantaine de figures recrutables aux profils tactiques variés — n’ont pas de vie propre. Ils sont définis par leur rôle : guérisseuse, lancier, stratège, capitaine… Ils ont des visages, des compétences, quelques lignes descriptives. Mais ils n’ont pas d’histoire. Leurs passés sont des variables oubliées, leurs motivations jamais explorées. Leur seule raison d’exister : renforcer vos troupes, remplir vos tableaux.
Le monde de Akatsuki ne raconte pas. Il liste. Il organise. Il classe. La narration n’est pas un fil rouge, mais un prétexte froid pour justifier la structure stratégique. Quelques textes d’introduction posent le décor, évoquant la guerre ancienne, la corruption, la chute des puissants. Mais le jeu ne prolonge jamais ce souffle initial. Pas de cinématique, pas de tension dramatique, pas de conflit intérieur.
En résulte une ambiance étrange : un royaume en ruine, riche de potentiel narratif, mais vidé de toute chair émotionnelle. L’univers est là, en surface, mais il ne respire pas. Il existe pour structurer vos actions, pas pour porter un récit. Ce n’est pas une faiblesse par oubli. C’est un choix. Akatsuki: Lord of the Dawn ne veut pas raconter une histoire. Il veut vous mettre au travail. Et dans cette vision utilitaire, l’humanité devient un facteur secondaire.
Tactique sans fureur, empire sans frisson
Akatsuki: Lord of the Dawn vous confie un royaume. Mais ce n’est pas une épopée — c’est un tableau Excel sur fond de guerre. Chaque jour est une tâche. Chaque combat, une série d’ordres. Pas de conquête exaltée, pas de montée dramatique. Juste la logique implacable d’un seigneur en reconstruction.
Le cœur du gameplay repose sur des batailles en temps réel, où vous déployez jusqu’à dix unités sur le terrain, chacune définie par une formation (de front, en coin, en encerclement…) et un rôle (épéiste, archer, mage, etc.). Le système vous permet de choisir vos compositions et vos placements avant chaque escarmouche, mais le contrôle en temps réel est limité : vous donnez des ordres d’attaque ou de déplacement, puis observez. Le jeu ne vous laisse pas manipuler finement l’action. Il veut que vous planifiiez, pas que vous improvisiez.
Et c’est ici que la rigidité s’installe. Si le nombre de formations est théoriquement intéressant, leur impact réel sur le champ de bataille reste flou, mal documenté, parfois invisible. On teste, on ajuste, mais le ressenti stratégique est tiède. Le rythme des combats est lent, les animations peu lisibles, les retours visuels minimalistes. La victoire ne provoque ni tension ni satisfaction. Elle se constate.
Entre les batailles, vous gérez votre territoire : récolte de ressources, affectation de travailleurs, recherche de technologies, amélioration d’équipements. Chaque structure (ferme, atelier, poste de pêche…) contribue à l’économie du domaine, mais le tout fonctionne comme une boucle de micro-optimisation, répétitive, mécaniquement propre… mais sans impact palpable sur l’univers. Construire une scierie ne change pas le monde. Ça remplit juste une jauge.
L’aspect RPG est quasi absent. Vos unités gagnent de l’expérience, mais il n’y a pas de progression narrative ni de choix personnalisés. Chaque personnage est une variable, non une identité. Pas de gestion des humeurs, pas d’événements dynamiques, pas de dilemmes.
L’interface sur Xbox Series est correcte, mais visiblement pensée pour PC. La navigation par manette est lente, imprécise, et certains menus exigent plusieurs manipulations là où un raccourci contextuel aurait suffi. Rien de cassé, mais rien de fluide. L’ergonomie, ici encore, suit une logique fonctionnelle, jamais ludique.
Akatsuki est un jeu qui respecte les piliers du tactical management, mais sans jamais leur donner vie. Il vous propose de gérer, de structurer, d’ordonner. Mais il ne vous donne jamais le sentiment d’être un vrai stratège.
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