Xenoblade Chronicles X, développé par Monolith Soft, a initialement vu le jour sur Wii U en 2015, offrant aux joueurs une aventure de science-fiction ambitieuse.
Le 20 mars 2025, le jeu renaît sur Nintendo Switch sous le titre Xenoblade Chronicles X: Definitive Edition, promettant une expérience enrichie et modernisée. Cette réédition parvient-elle à transcender les limitations de son époque pour séduire une nouvelle génération ?
Un exil parmi les étoiles
L’histoire de Xenoblade Chronicles X: Definitive Edition s’ouvre sur un désastre cosmique : la Terre n’est plus qu’un souvenir, pulvérisée dans un conflit entre deux civilisations extraterrestres bien au-delà de notre compréhension. Quelques survivants humains, embarqués à bord du vaisseau White Whale, dérivent dans l’espace jusqu’à s’échouer sur Mira, une planète aussi majestueuse qu’hostile. C’est ici que naît New Los Angeles, dernière enclave de l’humanité, bâtie en équilibre fragile entre espoir et désespoir.
Vous incarnez un soldat amnésique, repêché au milieu du chaos par Elma, l’une des commandantes de l’organisation BLADE, chargée d’explorer Mira et de protéger les colons. Contrairement aux précédents Xenoblade, votre protagoniste est un avatar entièrement personnalisable, une particularité qui, si elle renforce l’immersion, sacrifie une partie de la richesse narrative propre aux jeux de la saga. Votre héros est silencieux, vos choix influencent peu le déroulement de l’histoire, et l’implication émotionnelle en pâtit indubitablement.
Mais là où le jeu compense, c’est dans la galerie de personnages secondaires, Elma en tête. Commandante pragmatique et énigmatique, elle est le pilier de la narration, incarnant la froide détermination de ceux qui doivent assurer la survie de l’humanité. À ses côtés, Lin, une jeune génie de la mécanique au ton léger, contraste avec la gravité de la situation, tandis que les tensions entre humains et espèces extraterrestres se cristallisent autour de personnages plus ambigus, comme le mystérieux Lao.
L’histoire se tisse à travers des missions principales spectaculaires et des quêtes secondaires d’une richesse surprenante, explorant les dilemmes moraux de l’exil et du premier contact interespèces. Pourtant, malgré ses thématiques ambitieuses, la narration souffre d’un rythme haché, éclipsé par l’énorme liberté offerte au joueur. Certains moments clés manquent d’impact faute d’un fil conducteur plus resserré, et l’absence d’un protagoniste véritablement développé prive le jeu d’une intensité dramatique comparable à celle des précédents opus de la série.
Mira est une planète de mystères insondables, regorgeant de ruines, d’espèces intelligentes et de secrets qui laissent entrevoir une vérité plus vaste que la simple survie humaine. Mais les réponses se font attendre, et lorsque le générique de fin défile, beaucoup de questions restent en suspens, laissant espérer une suite qui, à ce jour, n’a jamais vu le jour.
Cette Définitive Edition aurait pu apporter un DLC conséquent, capable de résoudre ces différents écueils (comme le studio l’a fait avec Xenoblade Chronicles : Définitive Edition). Ce n’est malheureusement pas le cas, reste donc un arrière goût d’inachevé, un acte manqué qui aurait pu transformer un jeu à part en véritable pilier de la série.
Un monde sans limites, une liberté vertigineuse
Xenoblade Chronicles X: Definitive Edition ne vous tient pas par la main. Il vous lâche dans l’immensité sauvage de Mira, une planète aux proportions titanesques, où les continents s’étendent à perte de vue et où chaque sommet visible peut être atteint. Le jeu impose son ADN d’exploration absolue : ici, pas de couloirs déguisés, pas de chemins balisés. Seulement un monde ouvert totalement organique, à apprivoiser centimètre par centimètre.
Contrairement aux autres Xenoblade, où l’univers se découvre progressivement, Xenoblade Chronicles X vous donne accès à la quasi-totalité de Mira dès le début, à condition d’avoir le courage – ou l’inconscience – de vous y aventurer. Cette approche renforce la sensation de fragilité face à un environnement qui ne fait aucun cadeau. Un monstre titanesque peut surgir au détour d’un canyon, une tempête de sable peut vous surprendre au milieu d’un désert, et chaque pas hors de New Los Angeles peut devenir un périple éprouvant.
Mais le vrai tournant intervient lorsque vous obtenez votre Skell, ces exosquelettes géants qui changent radicalement votre façon d’explorer. Si les premières heures du jeu vous imposent de marcher, d’esquiver, de contourner, l’arrivée du Skell renverse la dynamique : vous passez du statut de survivant précaire à celui de chasseur suprême, capable de fendre les cieux et d’écraser des créatures qui semblaient auparavant invincibles. Peu de jeux parviennent à reproduire un tel sentiment de progression, où la liberté ne se contente pas d’être symbolique, mais s’exprime physiquement dans chaque mouvement.
Le système de combat reprend la base des précédents Xenoblade, avec ses attaques en temps réel basées sur des Arts déclenchables au fil du combat. L’aspect stratégique réside dans la gestion des postures et des enchaînements, certaines attaques gagnant en puissance selon votre position ou les combos exécutés par votre équipe. Cependant, Xenoblade Chronicles X complexifie la formule en intégrant une spécialisation en classes, vous permettant de jongler entre différents styles de combat au fil de votre progression.
Le combat au sol est dynamique et technique, exigeant un bon timing pour maximiser les effets des Arts et une parfaite synergie avec vos alliés. Mais c’est lorsque vous prenez les commandes d’un Skell que le jeu dévoile son vrai potentiel. Ces combats titanesques, où votre exosquelette affronte des monstres gigantesques dans des duels aériens et terrestres, sont parmi les plus spectaculaires du genre. Seul bémol : la gestion des ressources pour les Skells est laborieuse, certaines mécaniques liées au carburant ajoutant une contrainte frustrante à l’expérience.
Enfin, le level design se distingue par un monde structuré comme un véritable écosystème, où chaque région possède sa propre faune, sa flore, ses cycles de jour et de nuit et ses événements météorologiques dynamiques. Cette cohérence donne à Mira une identité propre, où l’exploration n’est pas une simple quête d’objectifs, mais une expérience en soi.
Cependant, cette ambition a un prix : la densité des systèmes de jeu est déroutante. L’interface reste encombrée et confuse, les tutoriels sont lacunaires, et le jeu vous laisse souvent découvrir ses subtilités par vous-même, même lorsque ces dernières sont obscures.
Xenoblade Chronicles X: Definitive Edition est un RPG colossal, exigeant et impitoyable, qui ne guide pas mais récompense la curiosité. Mira n’est pas un monde à explorer : c’est un monde à conquérir, à force d’efforts et d’adaptation.
Un opéra galactique entre splendeur et rudesse
Mira est un être vivant, une planète où chaque continent raconte une histoire différente. Des plaines luxuriantes de Primordia aux falaises rougeoyantes de Cauldros, des jungles luminescentes de Noctilum aux étendues glacées de Sylvalum, chaque environnement déborde de détails et de verticalité, invitant à l’exploration comme peu d’autres mondes ouverts.
La direction artistique de Xenoblade Chronicles X: Definitive Edition sublime cette diversité, jouant sur les contrastes de biomes, les architectures naturelles titanesques et une faune extraterrestre fascinante. Là où les précédents Xenoblade misaient sur une esthétique plus organique, X adopte une approche plus brute et réaliste, ancrant son monde dans une science-fiction crédible, presque naturaliste.
Cependant, si le design du jeu impressionne toujours par son ampleur, la technique accuse son âge. Monolith Soft a bien amélioré les textures, la résolution et la fluidité globale, mais les animations faciales restent rigides, et certains éléments visuels – notamment les modèles des personnages – trahissent leur origine Wii U. En revanche, la gestion de la lumière et des effets météorologiques a été retravaillée, renforçant l’atmosphère immersive de Mira, surtout lors des changements climatiques brutaux.
Le design sonore, quant à lui, est une signature audacieuse et atypique. Hiroyuki Sawano, connu pour ses compositions épiques dans Attack on Titan ou Aldnoah.Zero, livre ici une bande-son hybride, mêlant orchestrations grandioses, rock électronique et hip-hop. Si certaines pistes surprennent par leur tonalité décalée, d’autres comme “Noctilum” ou “Wir Fliegen” capturent parfaitement la majesté et le vertige de l’exploration spatiale.
Les bruits d’ambiance sont d’une richesse remarquable : le souffle du vent sur les plateaux désertiques, les cris des créatures nocturnes, le bourdonnement des infrastructures de New Los Angeles, tout participe à cette impression d’évoluer dans un monde qui existe indépendamment du joueur.
Le doublage propose un choix entre japonais et anglais, avec des performances correctes mais parfois ternies par une adaptation inégale des dialogues. Certains personnages, comme Elma, bénéficient d’un voix forte et nuancée, tandis que d’autres souffrent d’un jeu plus mécanique, notamment lors des dialogues secondaires.
Xenoblade Chronicles X: Definitive Edition réussit à transcender les limitations de la Wii U pour offrir une vision plus nette et plus ambitieuse de son univers. Toutefois, malgré ces améliorations, il ne peut masquer totalement son héritage technique, offrant un résultat hybride, entre remaster soigné et jeu encore marqué par son époque.
Une seconde chance pour l’exil
Le retour de Xenoblade Chronicles X sur Nintendo Switch avec cette Definitive Edition s’accompagne de plusieurs améliorations notables, visant à affiner une expérience autrefois freinée par les limitations de la Wii U. Si le fond du jeu reste inchangé, cette version se veut plus fluide, accessible et visuellement aboutie, tout en conservant l’ADN exigeant et massif de l’original.
L’optimisation technique est la plus évidente des retouches. Monolith Soft a retravaillé les textures, la distance d’affichage et la résolution globale, rendant les environnements plus nets et détaillés. Le framerate est désormais stable en 30 FPS constants, y compris lors des affrontements contre les plus grands monstres de Mira, où la Wii U peinait à suivre.
Les temps de chargement ont été considérablement réduits, une bénédiction pour un jeu où l’exploration passe par de nombreuses transitions entre zones et voyages rapides. New Los Angeles, autrefois marquée par des ralentissements et un pop-in visible des PNJ, bénéficie ici d’une fluidité accrue.
Côté interface, le menu a été entièrement repensé, avec une navigation plus intuitive et lisible. L’un des reproches majeurs de la version Wii U était la complexité de ses systèmes, souvent mal expliqués : cette Definitive Edition améliore les tutoriels, introduit des options de tri dans l’inventaire et permet un meilleur suivi des quêtes, évitant l’impression de se perdre dans des sous-menus labyrinthiques.
La gestion des Skells a été assouplie : le carburant se régénère progressivement au fil du temps, limitant les frustrations liées à l’entretien de ces exosquelettes. De même, l’acquisition des Skells, autrefois fastidieuse, est légèrement accélérée, permettant aux joueurs d’accéder plus tôt à ces véhicules iconiques.
Une bande-son remasterisée est également de la partie, offrant une meilleure spatialisation des effets sonores et une dynamique plus puissante sur Nintendo Switch. Les musiques restent identiques, mais le mixage global apporte une clarté accrue aux instruments et aux voix.
Enfin, pour ceux qui avaient regretté l’absence de doublage japonais sur la version Wii U en Occident, cette Definitive Edition intègre enfin cette option dès le lancement, laissant aux joueurs le choix entre les voix japonaises et anglaises.
Cependant, malgré ces retouches, Xenoblade Chronicles X: Definitive Edition ne corrige pas certains de ses écueils narratifs. Le jeu ne propose toujours pas de véritable conclusion, et l’absence de contenu inédit fort empêche cette version d’être une réinterprétation totale du jeu. De plus, aucune extension scénaristique majeur ne vient enrichir l’expérience, laissant un léger goût d’inachevé pour ceux qui espéraient du contenu supplémentaire.
Cette Definitive Edition n’est pas une refonte complète, mais une version optimisée et modernisée, corrigeant les aspérités techniques et ergonomiques d’un jeu dont la richesse et l’ambition demeurent intacts. Un retour bienvenu pour une œuvre qui n’avait jamais quitté sa cage de cristal sur Wii U, mais qui mériterait encore, un jour, un véritable successeur.
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