Sorti le 6 février 2025 sur Nintendo Switch, Moons of Darsalon, développé par Dr. Kucho! Games, s’inspire de l’ADN des jeux de réflexion et d’action-plateforme des années 80-90, tout en y injectant une dose de chaos moderne. Avec ses commandes vocales, sa physique avancée et son level design cruel mais ingénieux, le jeu ne se contente pas de recycler des idées d’antan : il les réinvente pour offrir une expérience aussi hilarante que frustrante.
Mais au-delà de son esthétique rétro, Moons of Darsalon est-il une mission de sauvetage mémorable ou juste un aller simple vers l’oubli ?
Seul contre l’incompétence galactique
L’espace est immense, impitoyable et rempli de dangers insoupçonnés. On y trouve des trous noirs affamés, des tempêtes de particules mortelles, des vaisseaux fantômes dérivant sans but… et surtout, une quantité affolante d’astronautes incompétents incapables de se déplacer sans supervision. C’est là que vous intervenez.
Dans Moons of Darsalon, vous n’incarnez pas un commandant charismatique prêt à mener son peuple vers la rédemption. Non, vous êtes un secouriste spatial, un anonyme chargé d’une mission ingrate : retrouver et ramener vivants les explorateurs perdus sur les lunes hostiles de Darsalon. Et croyez-le bien, ce n’est pas une tâche aisée.
Loin de suivre une trame narrative complexe et scénarisée, le jeu adopte une structure épisodique, où chaque mission est une nouvelle tentative désespérée de récupérer un groupe de survivants aussi disciplinés qu’une horde de lemmings sous anxiolytiques. Vos collègues ne sont pas des soldats d’élite, ni des explorateurs chevronnés : ils paniquent au moindre bruit, se bloquent contre les obstacles les plus anodins et vous regardent parfois droit dans les yeux avant de sauter dans un précipice sans raison apparente.
Votre personnage, anonyme mais indispensable, n’a ni destin glorieux ni arc narratif élaboré. Vous êtes un technicien de l’espace, un agent de maintenance interstellaire, un employé qui ne rêve que d’une chose : terminer sa journée sans trop de pertes humaines sur la conscience. Vos outils ? Un communicateur radio pour donner des ordres, une arme pour repousser les menaces, et surtout, une patience d’ange face à un groupe d’abrutis incapables de suivre une ligne droite.
Le jeu ne s’embarrasse pas d’un lore ultra-développé ou d’une histoire épique. Tout passe par des dialogues pleins d’humour, des interactions absurdes et une gestion catastrophique des survivants. Vos protégés râlent, posent des questions inutiles et font exactement l’inverse de ce que vous leur demandez, ajoutant une couche de chaos à des missions déjà suffisamment stressantes. Vous leur dites « Attendez ici » et les voyez courir dans un gouffre béant. Vous ordonnez « Sautez », et ils restent plantés là, vous regardant avec un mélange d’incompréhension et de mépris existentiel.
Mais sous cette façade humoristique se cache une critique légère et mordante des situations absurdes que l’on rencontre souvent dans les jeux vidéo. Qui n’a jamais pesté contre une IA stupide, contre des PNJ qui bloquent un passage ou contre des compagnons qui refusent de suivre des instructions évidentes ? Moons of Darsalon prend cette frustration et en fait son essence même, un défi où votre principal ennemi n’est pas l’environnement hostile, mais l’incapacité chronique des rescapés à agir avec un semblant de bon sens.
Chaque mission devient ainsi une succession de micro-aventures : un soldat bloqué sur une corniche, un explorateur perdu dans une grotte, un scientifique incapable de comprendre qu’une falaise est un obstacle mortel. Chaque sauvetage est un test de nerfs, une confrontation entre votre volonté de bien faire et l’absurdité du comportement des PNJ.
Finalement, Moons of Darsalon ne raconte pas une histoire traditionnelle, mais une série de situations absurdes où vous devez improviser sans cesse, adapter vos stratégies et tenter, contre toute logique, de ramener ces idiots vivants à leur base. Ce n’est pas l’histoire d’un héros, mais celle d’un technicien de l’extrême qui lutte quotidiennement contre la loi de Murphy en plein espace.
Et vous savez quoi ? Ça fonctionne à merveille.
La Science du sauvetage en milieu hostile
Dans Moons of Darsalon, vous ne tirez pas sur des hordes d’aliens, vous ne menez pas de guerre intergalactique, vous ne pilotez pas de vaisseau ultra-sophistiqué. Votre mission est bien plus simple… en apparence. Récupérer un groupe d’astronautes perdus et les ramener sains et saufs à leur base. Mais ce qui pourrait sembler un exercice de routine se transforme rapidement en un véritable cauchemar logistique, une course contre la stupidité humaine où chaque minute est une épreuve de patience et d’ingéniosité.
Le cœur du gameplay repose sur l’exploration et la gestion de groupe. Chaque niveau vous place dans un environnement lunaire aux reliefs escarpés, truffé d’obstacles naturels, de gouffres sans fond, de grottes mal éclairées et d’ennemis robotiques patrouillant sans relâche. Votre but est simple : retrouver les survivants et les guider vers un point d’extraction. Le problème ? Ils n’ont aucune envie de coopérer.
L’IA des rescapés est volontairement… défaillante. Ils vous suivent à la lettre, mais prennent tout au pied de la lettre. Leur dire « avancez » les fera marcher jusqu’à leur mort si un précipice se trouve sur le chemin. Leur dire « attendez ici » les fige totalement, même si un danger imminent approche. Il faut donc non seulement gérer leur progression, mais aussi compenser leurs erreurs prévisibles, prévoir leurs réactions absurdes et anticiper les situations où ils risquent de se bloquer eux-mêmes.
Heureusement, vous avez un arsenal d’outils et de stratégies pour éviter que votre mission ne tourne à la catastrophe totale. Vous pouvez donner des ordres directs via un communicateur radio, mais aussi modifier l’environnement avec un canon à terrain, créer des ponts, détourner l’attention des ennemis, ou encore utiliser des boucliers de protection temporaires pour éviter qu’un de vos protégés ne se fasse vaporiser avant d’atteindre la sortie.
Le level design est une pure merveille de sadisme déguisé en génie ludique. Chaque mission introduit de nouveaux dangers, obligeant à réfléchir constamment et à adapter sa manière d’aborder les sauvetages. Parfois, il faudra improviser avec les ressources du terrain, trouver des chemins détournés, ou utiliser vos propres outils pour construire une voie de secours.
Les ennemis et obstacles ne sont pas de simples distractions, mais de véritables menaces qui peuvent transformer une mission bien planifiée en un carnage lunaire en une fraction de seconde. Des drones automatisés patrouillent, prêts à ouvrir le feu sur quiconque s’aventure sur leur terrain. Les sols peuvent s’effondrer sous vos pieds, forçant des réactions immédiates sous peine de perdre tout votre groupe dans un gouffre béant. Les tempêtes de plasma peuvent brouiller vos communications, rendant vos ordres inefficaces au pire moment possible.
Le rythme du jeu est pensé pour créer une tension permanente. Vous n’avez pas de minuteur vous forçant à vous précipiter, mais chaque seconde passée à réfléchir augmente le risque qu’un des astronautes ne fasse une bêtise monumentale. L’objectif n’est pas juste d’aller vite, mais d’être méthodique, tout en improvisant face aux catastrophes qui surviennent inévitablement.
Au fil du jeu, les niveaux gagnent en complexité, ajoutant des éléments de puzzle, des réactions en chaîne, et des moments où il faudra gérer plusieurs groupes à la fois. Ce qui était un simple exercice de guidage au début devient un test de gestion de crise en milieu extraterrestre, où chaque rescapé supplémentaire représente une potentielle erreur fatale.
Mais ce qui rend Moons of Darsalon véritablement unique, c’est son approche volontairement chaotique. Le jeu ne vous prend jamais par la main, ne vous donne jamais de solution évidente. Il vous laisse expérimenter, échouer, recommencer, rire de vos propres erreurs et apprendre progressivement comment gérer cette bande d’incapables.
Finalement, Moons of Darsalon n’est pas seulement un jeu de plateforme et de réflexion. C’est un simulateur de gestion de crise en milieu absurde, une épreuve où vous devez composer avec des mécaniques imprévisibles, des décisions critiques et un groupe de survivants qui semble activement conspirer contre sa propre survie.
Et c’est précisément ce qui en fait un jeu aussi frustrant qu’exceptionnel.
Un ballet de pixels et une symphonie de désastre
Dans un jeu où chaque mission est une bataille contre le chaos, où les explosions, les tirs de lasers et les cris paniqués des astronautes rythment votre progression, la direction artistique et le sound design ne peuvent pas être de simples accessoires. Ils doivent amplifier la tension, accentuer la lisibilité du chaos, et donner à l’univers du jeu une personnalité unique.
Visuellement, Moons of Darsalon adopte une esthétique rétro assumée, directement inspirée des micro-ordinateurs des années 80, mais avec une modernisation subtile qui le rend bien plus fluide et agréable à l’œil. Les décors lunaires ne cherchent pas le réalisme, mais une atmosphère stylisée et colorée, où les reliefs accidentés et les ciels étoilés évoquent une science-fiction naïve et exubérante.
Le pixel art est particulièrement soigné, avec des animations expressives et exagérées qui renforcent l’humour et l’absurdité des situations. Les astronautes que vous devez sauver se déplacent avec une maladresse burlesque, trébuchent au mauvais moment, et réagissent à vos ordres avec des animations qui semblent tout droit sorties d’un cartoon d’anticipation. Les explosions sont volontairement exagérées, transformant chaque erreur en un spectacle hilarant, où un groupe entier peut être projeté dans l’espace à cause d’un pont mal placé.
Mais là où le jeu brille vraiment, c’est dans sa gestion dynamique de la lumière et des effets spéciaux. Contrairement à beaucoup de jeux en pixel art qui restent figés dans leur hommage au passé, Moons of Darsalon mélange habilement graphismes rétro et effets modernes. Les lumières des fusées, les tirs ennemis et les détonations créent un ballet de couleurs fascinant, et l’utilisation des ombres dynamiques renforce la lisibilité des niveaux en ajoutant une vraie profondeur aux décors lunaires.
Sur le plan sonore, le jeu est une véritable réussite. Les effets sonores sont aussi exagérés que le gameplay, transformant chaque explosion en un grondement tonitruant, chaque erreur en un cri déchirant d’astronaute paniqué. Les dialogues radio sont pleins de petits détails comiques, avec des astronautes qui râlent, s’inquiètent ou vous implorent de les aider d’un ton résigné.
La bande-son mélange habilement science-fiction rétro et compositions modernes. Les morceaux électroniques, parfois planants, parfois frénétiques, renforcent à la fois l’exploration et la tension des sauvetages. Chaque zone possède son identité musicale propre, allant de mélodies spatiales hypnotiques à des rythmes nerveux qui accélèrent la cadence lors des moments critiques.
L’un des éléments les plus marquants est l’utilisation du silence. Contrairement à d’autres jeux de plateforme frénétiques qui inondent le joueur de musique en continu, Moons of Darsalon sait quand s’arrêter. Certains moments laissent place à l’ambiance spatiale pure, où l’on n’entend que le bruit étouffé des pas sur le sol lunaire, les sons distants des tirs ennemis et le crépitement des communications radio déformées par les interférences.
C’est un jeu où chaque élément visuel et sonore ne se contente pas d’être esthétique, mais participe activement à l’expérience, rendant chaque mission plus immersive, chaque explosion plus percutante, et chaque cri d’astronaute plus mémorable.
Moons of Darsalon prend le meilleur du rétro et du moderne, offrant une identité visuelle et sonore unique, où chaque pixel, chaque son, chaque effet lumineux renforce le sentiment d’un sauvetage en pleine crise interstellaire.
0 commentaires